au nord du Togo, c'est à Kara ma belle amie que je me suis si souvent arrêtée,
où j'ai pleuré de la voir réduite au désespoir de ses luttes sans issue
Kara, répétition, incantation, sans forme ni objet
car
de Kara j’ai tant à dire, ombres revenues, reparties, visages confondus, oubliés
Kara, ma traversée – dedans, dehors, où passe la barrière des climats
Kara coulée au milieu des maïs, des verdures, des arborescences complexes, village habité de songes mémorables, étendu dans l’arène des collines de pierre
Kara, fleuve scarifié d’ordures plastiques qui émergent sous le fard de la saison lavée
Quand disparaît le vert, le sourire des feuilles et la souple perversité de sa fourrure, elle se lance, chat maigre, cousue de cicatrices et de cendres, à l'assaut de ses enfants
Kara, chantante et dure, parée de belle jeunesse paysanne, siffle sur ses trottoirs un air connu de gamine trop grandie, trop chargée, trop reconnaissable
Où grimace la bouche édentée d’une fille perdue
Je voulais dire : qui a tremblé
D’un amour éperdu
Sans jamais le trouver