Salta parade et s'affiche avec hauteur,
poignée de fards plaquée sur les arborescences
rouge rose fruitée des églises, vitrines naïves qui plantent les bougies du Vaudou sur les figures laquées de la Pacha Mama, verrières jaunâtres des cabines suspendues, murs écaillés des residencials en décadence.
Salta bourdonne, amoureuse fertile, étire jusqu'aux nuages son petit train de solitude, lance la cavalcade des orages, ajuste son corsage entre deux quebradas violettes et roule pour finir, nuit et jour, en ramenant toujours le verre et le discours pâle du Torrontès à sa bouche qui chante au dessus de la pluie
Salta la crépitante en lambeaux de dentelles, redore à chaque meurtrissure de tempête, à chaque convulsion, son blason de fierté, son habit de soleil éreinté
Salta me faisait fête, noyant le martyr des disparus qui déchiraient de blanc l'obscurité des parcs
Salta me faisait joie, fille ruinée qui n'a plus rien à perdre
Salta, dans la noirceur d'un jour tiède, s'est couchée à la cime des Yungas où se déployait le chaos des rumeurs sourdes
Je suis restée figée face aux salissures moisies de la chambre bleue
cherchant dubitative, parmi les traits incertains de Salta, la carte du désir, et le chemin du non-retour
mais n'ai pu que dormir, et dormir, plus loin que les vallées qui se fendent et s'étoilent
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jungle au dessus de Salta ( yungas) par temps d'orage