26 juin - album Effran
je disais il y a quelques jours que le paradis n'existait pas mais, dans notre imaginaire, peut être ressemblerait-il à l'île d'Effram. On y accède en pirogue à 5 heures du soir, après avoir passé Mlong et ses gigantesques fromagers, et le petit port d'Elinkine, conduits par Mamadou, dont cette île est le "bébé" chéri.
Sans eau douce et sans électricité, mais aménagée comme un jardin, c'est à dire qu'un homme a simplement mis en valeur, débroussaillé, et revivifié ce jardin naturel que constitue la nature en Afrique. Au bord du fleuve quelques cases nous attendent pour dormir où tout est construit en bois de palétuviers et feuilles ou tiges de rônier tressées, et d'un gout parfait, peut être parce que c'est juste ce que les hommes ont inventé dans le passé pour magnifier leur quotidien, et rendre belles les choses les plus ordinaires.
Le soir les jeunes vont pêcher du poisson avec ce petit filet rond qu'on appelle épervier et qu'ils jettent sur l'eau plate avec des grâces de ballerine. Ils ramènent un beau thiof, et de la friture qui laisse sur mes doigts un peu d'argent pur que révèle la lune montante.
Après un repas de canard grillé, les garçons et Mamadou se mettent à la musique: chants nostalgiques et doux en Diolla, accompagnés de trois djembés et d'une guitare traditionnelle qu'ils appellent "ékontine". Ai-je dit que la lune est parfaitement pleine, sur un fond moutonneux de petits nuages ronds qui lui accordent un pas de danse... je me laisse même aller moi aussi, dans l'harmonie générale du moment et du lieu, à l'accompagner de mes pieds maladroits sur la plage inondée de lumière pâle.
Le lendemain matin, réveil d'oiseaux multicolores et multisonores qui me fait tomber du lit vers 6 heures. Nous irons encore faire promenade en pirogue jusqu'à Katchouane (aucune orthographe n'est garantie) avant le déjeuner de poisson et l'immuable dégustation de thé noir et sucré pour aider au retour.
Demain je quitte la Casamance, mais j'enjoins fortement tous ceux qui me lisent à ne pas venir au Sénégal sans y passer quelques jours. On a mis beaucoup en avant les troubles sporadiques qui agitent les séparatistes de la région (et qui sont réels) mais le danger est bien moins grand qu'il est dit souvent, en tout cas mes amis qui y vivent la moitié de l'année depuis presque 20 ans n'ont pas lieu de s'en plaindre.
Et ici comme au nord, la "Teranga" (hospitalité) sénégalaise n'est pas un mythe !