au bord du Mali, la ville de "Madame Bâ" d'Eric Orsenna, la ville aux portes du désert où j'ai avalé les kilomètres et la poussière ocre du sable fou, la ville tranquille et plate où coule un autre fleuve (le Sénégal)
il faudra un jour écrire aussi sur les chemins des fleuves et des rivières de l'Afrique
le nom de Kayes signe l’attaque qu’un poing dur ouvre à la douceur d’une main tendue
le nom de Kayes est roc poussière, dragon désert gagnant sa course, écrasement brûlure qui vient buter sur le fleuve alangui
Kayes battait au fond de moi m’appelait démarrait sur les rails vers un demain peut être
Kayes chantait dansait et s’essoufflait à l’aube dans la rondeur ventrue de son aire
Kayes résonnait comme un mythe ruiné sur lequel pousse entre deux râles l’herbe fine des rêveries contraires
Kayes m’avait offert Ali Farka Touré et Boubakar Traoré qui chantaient "Diarabi" entre les murs de banco
Le nom de Kayes s’arquait en notes endurcies et tombait et tombait comme les gouttes une à une de la douche anémique où je me lavais du vent de sable rouge
Kayes, fiancée noire endormie de soleil, attendait le berger du Cantique
Kayes la belle riveraine lavait au Sénégal ses pieds de marcheuse altérée
Mais à Kayes j’ai touché la pluie froide et rêche de la tristesse et du découragement
Je marchais longtemps sur les chemins de Kayes
J’en suis partie la gorge sèche et le cœur épuisé
De tout ce que l’on aime