La ville se hérisse de rumeurs grillagées
La ville d'or se cambre sous l'arche pesante du souvenir
Entre deux, la ville pleure, quelquefois, le sait-elle ?
La hautaine Burgos ne dira rien de plus, sa mémoire se retire au carré des officiants
Alors, partir, sans retourner le compliment, s’éloigner du silence martyr, des autels meurtris, qui se glacent en ribambelles de papiers dorés.
Et parfois, revenir ?
Ocré des ciels d'orage qui ne l'atteindront pas, le vent de Salamanque se pose sans limites, tout à la joie qui façonne le décor des apparences
La ville entière est un soleil couchant qui ne veut pas dormir
Les lettres et les mots dessinent à chaque carrefour un écho oublié de la terre qui étend tout là bas, son chant et son chaos d'étoiles
Là bas. Où sa jeunesse ne mourra pas.
La cité, noyau d'un fruit de renaissance, murmure et chiffonne la voix des oliviers
Chacune s'y retrouve à sa place
La Sierra sans couleurs que le vent étreint chaque matin, chaque soir
Et puis elle, la cité, le village étendu, qui reste à dormir
Chat roux lové dans la torpeur des tours
C'est l'horizon qui balaye les regards, les murs se taisent, Caceres ne faiblit pas.
Dans toute ville, il y a deux villes
Celle du nom qui se rêve, de l'image encadrée, du souvenir encore imaginaire, du chant où claquent des rythmes trop connus
Puis, celle où l'on arrive, celle où l'on se perd, où l'on cherche, où l'on s'étonne, celle de la distance et du réel saisis par l'ivresse du sens
Séville demeure en ces deux villes qu'il faudra rassembler, sous la lumière des façades, dans l'aplomb des ruelles colorées, par la trace rouge des palais, avec le chant du désespoir.
Marcher, marcher encore, dans la chaleur moite enfin accordée qui se nomme Andalucia, qui se nomme Giralda, Alcazar, Plaza de toros. Qui se nomme enfin.
Mais laquelle est plus vraie que l'autre ?
Madrid, point perdu dans l'accident du plateau qui se cabre
Madrid, centre du néant abrupt dont les palais sont fantasmes surgis de l'argile et de la terre
Madrid s'est alignée, rugueuse et fière, adonnée à la sécheresse des nuits, à l'ordonnance des jardins, soumise à la force des règnes sans limites
Madrid, on voudrait y trouver la douceur qu'elle cache sous sa jupe bien mise, on voudrait la voir surgir dans sa nudité débridée, on voudrait qu'elle se penche et s'alanguisse, un peu.